En 2024 plus que jamais, dénoncer l’extrême-droite

Depuis la Libération, jamais les héritiers de Pétain ne s’étaient autant approchés du pouvoir qu’aujourd’hui. L’alerte est générale.

C’était bien d’être courageux en 2002 mais c’est aujourd’hui que c’est important de l’être !

En 2002, c’était la première fois que l’ancien tortionnaire d’Algérie arrivait au second tour de l’élection présidentielle. Il n’y avait alors absolument aucun risque qu’il ne gagne. Aucun. Pourtant, toutes les organisations sportives, culturelles, religieuses, éducatives … avaient dénoncé le risque de l’extrême-droite. Pour parler de domaines que je connais un peu plus, le scoutisme d’un côté, les évêques de l’autre, les deux institutions n’avaient pas hésité et avaient été très clairs dans leur dénonciation de l’extrême-droite.

Pourquoi alors, toutes ces hésitations aujourd’hui ? Pourquoi refuser de nommer l’extrême-droite ? Pourquoi préférer dénoncer « les extrêmes » de façon indifférenciée ? Comme si une coalition au sein de laquelle on retrouve un parti issu d’une scission du PS, le PS lui-même, les écologistes et quelques autres ultra-minoritaires, était comparable à un parti fondé par des Waffen SS. La coalition du Front Populaire compte certes des individus peu recommandables en son sein, mais l’extrême-droite est « ataviquement » détestable et dangereuse. Le racisme, l’exclusion, le climato-négationnisme sont des idées constitutives du RN. C’est son programme. Son projet de société, c’est de le rejet de l’autre.

Le texte particulièrement tiède envoyé par le Conseil d’Administration des Scouts et Guides de France a déçu beaucoup de ses membres. Cette tiédeur a été justifiée par le fait qu’il y a désormais des adhérents et adhérentes chez les SGdF qui votent pour le RN et qu’il ne faut donc pas les froisser 1. Cette même tiédeur se retrouve chez beaucoup de chrétiens et chrétiennes qui nous expliquent que ce n’est pas la bonne méthode de dénoncer le RN, que ça ne fait que stigmatiser, que ça ne marche pas.

On comprend déjà que quand c’est facile de dénoncer, on n’hésite pas. En 2002, on ne risquait rien. Les électeurs et électrices de Le Pen n’étaient pas dans nos cercles. On pouvait pour pas cher s’acheter une belle conscience. Oui, mais aujourd’hui, c’est plus compliqué parce que ça risque de fâcher. C’est bien au contraire justement aujourd’hui particulièrement qu’il faut rappeler la ligne rouge ! Non, le parti de la famille Le Pen n’est pas un parti comme les autres, il n’est pas tolérable, ses idées sont dangereuses. C’est facile d’être résistant quand la menace n’existe pas. Quelle tristesse, quelle honte de voir aujourd’hui ces grands résistants de 2002 s’aplatir de peur de froisser quelques adhérents. Ce n’est pas quand la fièvre monte qu’on décide que finalement, 39°, c’est acceptable. Par contre, on change de remède.

Toutes ces excuses constituent à mes yeux une double faute.

Et c’est là la deuxième faute : évidemment que des déclarations aujourd’hui pour dénoncer le RN ne vont pas changer grand-chose au résultat des législatives. Elles peuvent éventuellement, dans les deux camps, mobiliser des abstentionnistes. Il n’est plus possible de changer fondamentalement le résultat de l’extrême-droite le 7 juillet au soir. On peut l’endiguer en partie mais elle sera de toute façon beaucoup, beaucoup trop haute. Par contre, ces déclarations, ces rassemblements sont autant de mobilisations pour la suite. Ce sont des rendez-vous donnés pour l’après-législatives. Oui, nos organisations, en particulier chrétiennes, doivent se regarder en face et reconnaitre qu’elles n’ont pas assez défendu la coopération, la fraternité et la sororité. Nos organisations doivent reconnaitre qu’elles n’ont pas répondu au déclassement des zones rurales, des classes moyennes. Mais pour éradiquer la peste d’extrême-droite demain, il faut préparer la suite aujourd’hui. Il faut se retrouver, il faut redire fermement nos idéaux, il faut clamer notre Espérance et notre soif de Justice.

Si le Christ vous parle, d’une façon ou d’une autre, si les Évangiles vous interpellent, soutenez le rassemblement Justice & Espérance qui se tiendra ce dimanche 23 juin à 16h, sur l’Esplanade du Souvenir Français à Paris.

  1. On notera au passage que même d’un point de vue stratégique, c’est quand même surprenant de systématiquement prendre soin de la minorité d’extrême-droite tout s’asseyant sur la grande majorité des membres qui luttent en silence. A force de ne pas vouloir froisser les uns, on désespère, et on perd, les autres. ↩︎

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